samedi 25 avril 2015

Impressions asines chez « les Ânes du gîte »...par Jean-Jacques (merci)


Dans le cadre du stage en entreprise requis en vue de l'obtention du Certificat de Spécialisation « utilisateur de chevaux attelés » au CFPPA de Montmorillon, j'ai choisi de passer 15 jours (du 23 février au 6 mars 2015) chez Armelle et Jean-François Cottrant près d'Uzerche. Délaisser un temps les chevaux de trait soit, mais pour des ânes, j'avais bien senti comme une interrogation chez mon formateur quand je lui avais annoncé ma décision. Ignorant tout de la « pratique des ânes au travail », n'ayant jamais côtoyé d'ânes de près ou de loin, mais passionné de longue date par tout ce qui touche aux relations -et à la communication- entre humains et animaux, qu'ils soient domestiques ou sauvages, au travail ou dans la nature, j'avais enfin l'opportunité d'approcher « le petit peuple des ânes ».
Penser comme un âne
C'est bien aussi cette connivence et cette intimité perdue avec des animaux au travail dans les campagnes, qui n'excluent pas une familiarité qui peut paraître parfois un peu brutale vue de la ville, que j'avais envie de connaître. Il me faudrait « se laisser aller à sentir les choses ». Pour cela, j'avais besoin d'un diplomate pour m'aider à rencontrer l'âne comme une autre manière d'être vivant, de voir et d'aller. Le diplomate, étymologiquement, est « plié en deux » : entre deux langages, deux comportements, deux systèmes d'intérêts. C'est ce qui le rend apte à être négociateur et interprète, entre les humains et les ânes ; formé à penser comme un âne (n'y voir aucune allusion de mauvais goût). Ce serait Jean-François, avec ses hardes de races normande et cotentine. Pensez donc, pas moins d'une trentaines d'ânes rien qu' à Condat-sur-Ganaveix, et encore une quinzaine chez Armelle dans leur berceau de races, dans l'Orne. Rencontré lors d'une journée de formation technique au CFPPA sur la traction animale - savoir différencier force, travail et puissance, pour travailler dans la durée et le respect du confort de l'animal-, l'homme était venu avec un traîneau, des bidons de lait, mais sans ses ânes, pour des essais de mesure (avec un dynamomètre) des forces de traction exercées par un équidé au travail tractant un outil, notre cheval de trait poitevin en l'occurence. J'avais été séduit par son parcours, son expérience professionnelle, son propos, sa simplicité et sa générosité. Dans sa promotion de la traction asine, c'est aussi une philosophie de vie au quotidien avec les ânes au travail qui s'exprimait. Je tenais enfin mon diplomate.
Les oreilles au garde-à-vous... et Jean-François vient "cueillir" celui qui va s'y coller aujourd'hui
Ânes en stock
Pendant ces quinze jours, j'ai pu travailler avec 10 ânes différents, mâles castrés et jeunes entiers de 18 mois pour les plus jeunes dans une grande variété d'usages et de conditions, de harnachement, d'attelage et de menage. J'ai pu observer et approcher les différents tempéraments et comportements des ânes au cours des étapes successives de travaux ou d'exercices. Apprécier aussi, modestement, les progrès respectifs au cours de ces deux semaines, sur de jeunes ânes comme Djembé, Cadichon, ou Balluchon, un âne intelligent mais fantasque… mis à l'attelage, en simple, en paire ou à trois, au débardage en simple ou en paire, ou encore au cordeau, pour la première fois. J'ai pu aussi constaté différents tempéraments dans le travail d'ânes déjà formés et expérimentés. Découvert que trois ânes à l'attelage sont capables d'effectuer le même travail qu'un cheval de trait de 750 kg sur la même durée, 6 heures.
L'attelage à trois, le plus adapté pour les travaux agricoles et forestiers de longue durée... la belle innovation de Jean-François.
 
Bon, mais en dehors de Vidocq et de Canaille... je n'arrive toujours pas à les reconnaître, ces ânes !
Onze paires d'oreilles au garde-à-vous
Ma première rencontre avec les « ânes chocolat » dans le pré des mâles, accompagné de Jean-François, ce sont onze paires d'yeux et onze paires d'oreilles dressées au garde-à-vous qui déjà vous lisent. On sent une confiance, une curiosité, un intérêt peut-être, une interrogation aussi : ce sont lesquels d'entre-nous qui vont s'y coller aujourd'hui ? Tandis que Jean-François, avec ses « salut les cocos » amicaux, d'une voix douce et chantante, les licols masqués dans son dos toutefois, approchent les élus du jour d'un pas calme, pour leur passer le bras délicatement sur l'encolure, sans cesser de parler à chacun. Je n'ai observé de foulées d'insoumission ou de révolte, ah les bien grands mots, qu'à une occasion, et jamais au-delà d'une trentaine de mètres, dans un pré d'environ 6 hectares. C'est tout dire !
Rodéo et son bât pour le chantier de réparation de clôture du pré des femelles
Des « courtis'ânes » dans leur écrin de fougères
Une autre rencontre rare, c'est celle avec la troupe de femelles, les « courtis'ânes », pressées à l'entrée du pré dans leur écrin de fougères pour accueillir Rodéo, un mâle castré équipé de son bât à échelles du Queyras pour réparer une clôture. Bon, mais en dehors de Vidocq, avec ses oreilles roussies, et Canaille, un jeune entier chétif, je n'arrivais toujours pas à les reconnaître au pré, ces onze ânes, après quinze jours de travaux quotidiens. Qu'importe. Cette première fois chez le petit peuple des ânes au travail, chez Armelle et Jean-François, cela s'appelle le bonheur.
 
 
les "courtis'ânes", la harde des douze femelles dans leur écrin de fougères.
 
 
 
Rodéo au départ pour le tri collectif à Condat-sur-Ganaveix. version originale du bât à échelles queyrassin.
 
 Jean-Jacques Blanchon







1 commentaire:

  1. Quel hommage (bien mérité) !!! cher Jean François pour toi et tes ânes fantastiques.
    Merci mes amis Armelle et J.F pour ce que vous donnez et transmettez d'humanité...
    M. de savânes

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